dimanche 31 octobre 2010

Grèce Jour 1 - Athènes, souillon et envoutante


Première étape - Athènes - Jeudi 20 août 2009


7h01 - C'est heure ! Comme à chaque départ, je suis au comble de l'excitation, vérifiant par trois fois si je n'ai rien oublié dans ma petit valise à roulettes, le cœur battant, l'esprit déjà loin. Je me trompe évidemment de direction dans le RER devant m'amener à l'aéroport. Chemin rebroussé, je m'écroule sur la banquette du train, essayant de rassembler mes esprits et me concentrer sur deux jolis baroudeurs israéliens cherchant leur chemin. Du bon son dans les oreilles, la douce promesse d'un exil en terres inconnues, d'un baptême.

Que l'aventure commence !

9h10 - Embarquement immédiat ! La clim' me donne des frissons (le message d'au-revoir de l'un de mes prétendants également). Ça parle italien autour de moi, le voyage commence déjà dans le cockpit.

12h – Escale à l'aéroport de Milan. Je n'ai pas vu le temps passer. Je cherche désespérément une sortie pour fumer. Ouf enfin dehors ! Je suis devant les ARRIVAL GATES. Il fait chaud (34°), l'endroit n'est pas du tout confortable : entre les pots d'échappement, la fumée crachée par mes voisins chauffeurs de taxi, la moiteur du parking, il est dur de se détendre un peu. Observer le manège des employés de l'aéroport, des voyageurs pressés, ceux qui arrivent, ceux qui partent, ceux qui attendent, m'apaise un peu. J'aime lire ces mouvements dans les lieux de transit. On y observe une réelle palette d'attitudes, une galerie de personnages qu'on retrouve dans chaque aéroport, gare, station de taxi... Ce manège est certainement le dénominateur commun à tout voyage.

14h20 – Départ pour Athènes. Les autres voyageurs se diversifient : italiens, un couple de français, des Siths ... Mais Dieu que le voyage est long et incommode, j'ai si mal aux genoux (princesse, moi ?).

17h35 (non 18h35, décalage horaire oblige) - Je sors de l'avion comme un diable de sa boîte. Cette fois-ci pas besoin d'attendre pour fumer, on peut s'adonner à ce vice au sein même de l'aéroport d'Athènes, aux portes d'arrivée, ce qui rend l'atmosphère oppressante et crasseuse. A l'extérieur, je rend service à un allemand (cigarette + quelques indications sur la carte). Là un charmant chauffeur de taxi propose de me conduire au centre-ville. Rougissante (et méfiante), je n'ose accepter l'offre de ce taxi à la sauvette et lui préfère le bus X95, bondé et tellement moins séduisant. Direction « place Syntagma » (ou Stigmata, comme nous la surnommerons bêtement).

Premières impressions... Les grecs conduisent vite, mal, et bruyamment. Les femmes tout particulièrement. De la vitre du bus, j'aperçois les premiers reliefs : des monts généreux se découpant rondement sur un ciel lourd et brumeux. Une végétation sèche, faite d'oliviers et de figuiers. Presque instinctivement, je me rappelle du mythe fondateur de la cité antique. L'olivier, le cadeau de la déesse, qui devint l'un des piliers de l'économie du peuple athénien. Qui aurait cru que ce simple arbuste serait à l'origine du développement d'une si grande civilisation. Des enseignes publicitaires connues s'enchaînent rapidement, la ville approche. Je remarque dans ce paysage urbain dense des églises en croix grecque, de hauts et fiers palmiers, des taxis jaunes profilés.


Place Syntagma - photo Mmarta

Arrivée à Syntagma (plus d'infos ici - eng), le jour décline. Je dois retrouver mes amies à l'hôtel... mais avant cela je dois trouver un cybercafé d'où envoyer une lettre écrite quelques heures auparavant. C'est une question de vie ou de mort (on l'aura compris, elle s'adresse à un énième prétendant...) ! Cette mission accomplie, je m'engouffre dans un taxi avant que mes acolytes ne s'inquiètent.

Je ne me souviens plus du nom de l'hôtel (Plaka Hotel peut être), situé non loin de l'Acropole. Établissement de standing : la réception fait « grand hôtel », la chambre est confortable et sa petite salle de bain sur-équipée. J'y serais bien restée plus longtemps, mais mes compagnes, m'ayant déjà assez attendu, me pressent pour partir dîner en centre-ville.

Dehors, la ville est sale. Nous sommes dans le quartier Plaka, ancien quartier très touristique, fait de petites ruelles parsemées de restaurants, d'échoppes et d'hôtels. J'ai l'impression d'être dans l'une des rues crasseuse et populaire de Paris, près de La Chapelle ou de Château Rouge, où seules les enseignes de snacks ou de vente cartes téléphoniques éclairent les trottoirs. Il n'y a pas âme qui vive, le temps est lourd, le chemin très peu éclairé, et le sol pavé est presque poisseux et glissant.

Nous rejoignons l'Acropole en métro. Quelle beauté ! Je la vois de loin, blanche et inaccessible. Mon imagination s'emporte, mon désir me tiraille le ventre. Je n'arpenterai ses marches que plus tard, mais à l'heure où je la regarde ce soir-là, un incroyable sentiment de frustration me fait presque venir les larmes aux yeux. Cachant mon trouble à mes amies, nous reprenons la route au sein des ruelles touristiques, évitant les chiens endormis assommés par la chaleur. Les boutiques sont emplies de babioles hypnotiques. Nous arrivons sur une petite place bondée, où les terrasses de restaurants jouent des coudes pour recevoir le maximum de pèlerins affamés. Les filles connaissaient déjà le petit restaurant où nous nous installons. Le serveur fait bien son travail, il est avenant et amusant. Nous commandons : salade grecque (concombre frais, poivrons, oignon rouge, olives noires, et une plaque entière de fêta) et Pasticcio (sorte de lasagne grecque ). C'est un régal ! Les filles me font un bref résumé de leur semaine passée sur les terres, et m'annoncent que nous prendrons le ferry demain aux aurores, et qu'il faut donc ne pas trop traîner ce soir.

De retour au Plaka, nous avons à peine le temps de profiter de l'incroyable vue depuis les toits de l'hôtel, aménagés en une somptueuse terrasse sur plusieurs niveaux, avec bar lounge et piscine.

Acropole de nuit, lors des incendies qui ravagèrent le pays
quelques jours avant notre arrivée -
Le Figaro


Je fume une dernière cigarette devant l'Acropole illuminée, flamboyante. J'aurais aimé faire durer cet instant éternellement, prolonger ma contemplation quasi religieuse jusqu'au ravissement.

Nota Bene : pour ceux qui auront reconnu, la petite chouette, logo des Editions Les Belles Lettres, reprend le motif d'un célèbre vase à onguents (aryballe) visible au musée du Louvre (voir)

samedi 30 octobre 2010

Grèce 2009 - Initiation d'une Koritsi

Athéna dite "Pallas de Velletri"

Copie romaine d'une œuvre attribuée à Crésilas - Musée du Louvre


HERMAION


Ce voyage était prévu depuis quelques mois. Je n'étais jamais allée en Grèce, et fouler les terres héllènes m'enthousiasmait vraiment : abreuvée de mythes et légendes antiques, assommée par de laborieux thèmes et versions en classe de Grec ancien, frustrée par ces diapositives jaunies en cours d'histoire de l'art ancien à Paris IV, par ces fragments soigneusement disposés au musée du Louvre, je devais aller moi même sur place pour vérifier le bien fondé de ces enseignements, tester ces Grecs qui me narguent depuis que je suis enfant.

Ainsi ce fut une sorte d'expédition initiatique vers le berceau de l'histoire « européenne », de l'art et de la pensée... « Mon » berceau, pour éviter ici toute polémique inutile sur la non objectivité de mon affirmation ...

Nous devions partir à cinq, puis les évènements ont fait que nous nous retrouvions à quatre amazones, pour une semaine de séjour bien méritée à l'île de Paros (Cyclades).

Nous ne souhaitions pas nous perdre dans le tumulte d'îles plus connues pour leurs soirées que pour leur soleils couchants. Paros semblait toute indiquée pour les amateurs de silence et de repos. Mes amies se sont accordées en amont une semaine dans le Péloponnèse, pour arpenter les reliefs, visiter les vieilles pierres et souffrir de la compagnie d'un soleil de plomb et d'un vent insistant. Ces derniers ne nous quitteront pas d'une semelle durant tout le séjour.

Illustrations : mes instruments de torture, le Grand Bailly et Hermaion, ouvrages destinés à me faire rentrer le grec ancien dans le crâne... Maintenant je sais ce qu'a dû endurer le grand Zeus ...

mardi 5 octobre 2010

Rome Jour 4 - Al Presidente


AL PRESIDENTE - Via in Arcione

Une rencontre pourtant fera mon bonheur en cette fin de voyage morose.

Je ne voulais plus voir de Rome que ce qu'elle dissimulait : les murs sales, les vieilles affiches, les portes closes... Le sans intérêt me reposait.

Je tombe alors sur une devanture dont les portes, entre-ouvertes, sont couvertes des macarons colorés de divers guides, label, marques .... Routard 2010/2009/2008, Petit Futé, Lonely Planet, Guide Michelin, pour ceux que je connais ...

Intriguée par ces lauriers et l'apparente modestie de l'échoppe, je franchis le seuil de ce qui me semble être un restaurant. Sur la porte, des horaires d'ouverture. J'arrive trop tôt.


Je surprends un homme derrière le bureau d'accueil. Je m'excuse :

"Pardonnez-moi, je sais que vous n'ouvrez qu'à 13h30 mais je n'ai pu m'empêcher d'entrer. Vous auriez une carte du restaurant que je puisse me souvenir de vous ? Vos références sont impressionnantes ! J'aimerais beaucoup revenir un jour pour goûter votre cuisine."

"Merci mais malheureusement nous fermons pour les congés d'été. Attendez je vais vous trouver une carte. Il doit en rester une quelque part... Ah mince je pensais qu'il m'en restait une ... nous remisons tout en fin de saison ... mince ... attendez une minute ... "

Là il farfouille dans les piles de paperasses amassées plus ou moins soigneusement devant lui, ce qui me laisse le temps d'apprécier les lieux. La salle est d'une rare simplicité ; on imagine bien que la déco, elle aussi, était d'ores et déjà "remisée".

J'entends alors, imperceptiblement, une légère mélodie connue. Je tends l'oreille, ne prêtant plus aucune attention au pauvre réceptionniste maintenant à genoux sous son bureau, qui, dépité, arrachait la feuille d'un carnet qui trainait là pour noter à la main le nom du restaurant et son numéro de téléphone.

"Tchaikovsky" m'écriais-je ! "Mon concerto favori", celui que j'ai écouté en boucle cet été.

Il lève les yeux vers moi, incrédule. "Vous connaissez ? "

"Oui je n'ai cessé de l'écouter ces dernières semaines ! "

Nous ne disons plus rien. Le mouvement se termine. Je quitte le bonhomme avec un grand sourire, son papier à la main et des airs de violons dans le cœur.

Il est l'heure de rentrer...

Ah j'oubliais ! Je suis passée à nouveau devant la Fontaine de Trevi, toujours aussi invisible derrière son rideau de bermudas et autres mini-shorts jamais très bien portés...

J'arrive trop tôt à l'auberge. Je patiente encore au bar, mais Agnès est déjà partie ; elle ne voit plus rien d'autre que le cadran numérique de son téléphone.

Le récit de mon retour est sans intérêt. Il n'y a plus de cœur, juste l'impression d'être ce mouton qu'on reconduit à la bergerie après qu'il se soit écarté du troupeau, pour quelques heures de douce liberté.


A bientôt Rome !

Je reviendrais mieux chaussée, mieux accompagnée, car il m'a manqué un complice lors de ce voyage, autre que mon petit carnet de poche, plus sage, moins impatiente, mais toujours avide et conquérante.

Ainsi se clos mon périple. Je l'agrémenterais de notes de temps en temps, lorsque que ressurgiront des souvenirs aujourd'hui endormis, ou des précisions nécessitant un récit moins linaire et anecdotique.

Al Présidente
Via in Arcione, 95
066 797 342
Site internet